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film noir - Page 2

  • Niagara (1953)

    Un film de Henry Hathaway

    9682258817_67b4aa1ee9_m.jpgComme son titre le laisse supposer, le film de Henry Hathaway (connu pour ses westerns et ces films noirs, comme c'est le cas ici, il a aussi réalisé le superbe Peter Ibbetson) prend pour décor la rive canadienne des chutes du Niagara, destination privilégiée des jeunes mariés pour leur voyage de noce. C'est justement le cas des Cutler (Jean Peters et Casey Adams), qui découvrent en leur voisins des personnages bien étranges : la sublime Rose Loomis (Marilyn Monroe) et son mari George (Joseph Cotten). Ce couple n'est pas en très bon termes...

    Ce film en Technicolor utilise diablement bien les décors naturels des chutes, capturant toute leur beauté, mais aussi sa terrifiante violence. Le bruit des chutes s'écrasant sur les rochers emplir le film, de même que cette bruine subtile qui fait apparaître, comme un tour de magie, des arcs en ciel dans les coins du cadre. Dès la scène d'ouverture, ce mélange de beauté et d'étrangeté saisit le spectateur, quand George Loomis paraît s'extirper des chutes (en fait une balade matinale, arguant par une voix-off fatiguée :

    "Pourquoi les chutes m'attirent-elles ici à cinq heures du matin ? Pour me montre combien elles sont immenses et combien je suis minuscule ? Pour me rappeler qu'elles n'ont besoin de l'aide de personne ? Très bien, elles l'ont prouvé. Et puis après ? Il leur a fallu dix mille ans pour devenir indépendantes. Qu'y a-t-il d'extraordinaire à cela ? J'imagine que moi aussi, je pourrais le devenir, mais cela demanderait peut-être un peu plus de temps..."

    Une aura métaphysique plane déjà sur le film. On retrouve l'homme hanté par ses démons, déjà prisonnier d'un destin funeste. L'ombre du film noir obscurcit aussi ce film pourtant lumineux, qui s'attache constamment à montrer des extrêmes : des paysages magnifiques associé à une ambiance de dégoût, lassitude, de mort... Le film débute d'ailleurs par cette voix-off citée au-dessus, trait récurent de ce courant qui nous a donné de ce beaux moments de cinéma.

    Hathaway voulait James Mason dans le rôle de George Loomis, mais Joseph Cotten parvient sans mal à incarner cette enveloppe fatiguée par la vie. Marilyn, au plus fort de sa beauté irrésistible, est incroyablement désirable, occupant la place de la femme fatale si caractéristique du noir. Lorsqu'elle débarque avec sa robe rouge/fushia dans une petite soirée de l'hôtel où elle séjourne, et fait tourner la tête de tous les hommes présents, le temps semble s'arrêter, elle devient alors l'unique centre d'intérêt ; concentrant toutes les obsessions, tel le soleil qui irradie tout.

    Ne parler que de Marilyn serait un tort, tant Jean Peters, femme très belle également, occupe son rôle avec une vraie prestance. Elle constitue une version de la femme plus réelle, plus consciente aussi, que Marilyn, qui incarne ici le fantasme absolu. Hathaway, ravi de sa collaboration avec Marilyn, lui donne ici l'occasion de briller, et de montrer une facette plus sombre, plus que dans n'importe quel autre film. Ce ne sera que le début, car avec Rivière sans retour (Otto Preminger, 1954), Sept ans de réflexion (Billy Wilder, 1955) ou évidement Certains l'aiment chaud (Billy Wilder, 1959), la carrière de l'actrice aura été à la hauteur du mythe.

     

    Source image : affiche du film © 20th Century Fox

  • Classics Confidential : Woman on the Run (1950)

    Accédez à la chronique du film de Norman Foster

  • Classics Confidential : L'invraisemblable vérité (1956)

    Un film de Fritz Lang

    8548510502_6ec5d17530_m.jpgFilm jumeau de La cinquième victime, L'invraisemblable vérité sort la même année, et garde un petit rôle pour les médias, grand thème du précédent film. Ceux-ci vont relater avec moult détails le périple judiciaire que vit Tom Garrettt, ancien journaliste qui, pour faire "un bon papier" sur les dysfonctionnement de l'appareil judiciaire, crée les preuves de son implication dans le meurtre d'une jeune femme. ce point de départ, assez invraisemblable, fait du film non pas un polar, comme cela pourrait être le cas, mais démonte bien le mécanisme de falsification de preuves, comme un modèle inversé du film policier, où l'accent est généralement donné sur la recherche de preuve par une figure de l'autorité judiciaire : flic, détective, inspecteur d'assurances, etc. La cinquième victime partage donc aussi cet aspect faussement policier pour parler d'autre chose. Ici, les longs temps qui voient le complice de Garrett prendre les photos des preuves falsifiées, pour composer son dossier de demande de grâce une fois que Garrett sera inculpé puis condamné, fait montre du mécanisme machiavélique apparemment bien huilé qu'utilisent les deux compères. Ainsi, ils démontreront peut-être que le système d'inculpation de la justice américaine, se satisfaisant de preuves indirectes et que, "beyond a reasonable doubt" - titre original du film, "au-delà de tout doute raisonnable", un accusé peut être condamné injustement.

    Les ponts entre les deux films ne s'arrêtent pas là : on se souvient que le couple amoureux laissait sonner le téléphone dans le dernier plan de La cinquième victime. Dans une de leur première scène commune, Tom Garrett (Dana Andrews) et Susan Spencer (Joan Fontaine) sont face à un téléphone qui sonne, pour cette fois y répondre. Et leur couple va, durant les 1h20 du film, être mis à mal par l'aventure supposée de Garrett avec une jeune femme.

    La volonté de Garrett durant le film est difficilement compréhensible, comme il a l'air de s'embourber lui-même dans une affaire dont, très clairement il ne peut pas sortir indemne ; on sent ici poindre l'ombre du film noir, bien plus que dans La cinquième victime. Même avec ce que le spectateur recueille en matière d'informations, sa volonté ne peut être comprise que comme une pulsion sacrificatrice, et/ou masochiste. De plus, son mariage proche avec Susan devrait en faire un heureux homme : comme on le voit se lancer à corps perdu dans cette aventure, et dans la rédaction d'un livre (fil narratif qui sera cependant rapidement abandonné) qui met une barrière à leurs projets communs, sa passion pour elle a l'air peu aboutie. Mais le film est également sur le jeu des apparences, et comme on le sait, elles sont souvent trompeuses. Alors, même si l'on devine rapidement un des événements majeurs du film (le seul détenteur de la vérité de la falsification des preuves meurt accidentellement en emportant les preuves avec lui), les méandres de l'intrigue -qui, dans le dernier quart, prend la forme d'un film de plaidoirie- nous révèle quelques surprises. 

    Comme le relève justement Bernard Eisenschitz dans le fabuleux livre proposé en complément, toute la valeur du film se situe dans l'écart entre ce qui est dit et montré au spectateur, et ce qu'il ne sait pas. Ainsi, certains révélations faites par l'accusation lors du procès viendront soit conforter le savoir du spectateur, ou alors il se satisfera intégralement des réponses apportées par Garrett. Le cheminement pour arriver à la vérité est tout de même tortueux, pour au final justifier une institution que Lang semble tout de même accuser, étant lui-même totalement opposé à la peine de mort, comme le personnage de l'éditorialiste complice de Garrett.

    Si je ne révélerai pas la fin du film, tout au moins puis-je avancer qu'elle préfigure les films à twist qui étaient fort peu répandus au milieu des années 50 ; dans le même temps, le procédé peut sembler malhonnête, allant à l'encontre de tout ce qui a précédé. Ce serait manquer pas mal d'indices qui sont semés tout au long du film. Mais Lang, en grand maître de la rhétorique cinématographique, démontre aussi, si besoin l'était, de l'immense force de persuasion de l'objet film. Et, rien que pour cela, cette Invraisemblable vérité vaut le coup d'être vue !

  • Classics Confidential : Le rôdeur (1951)

    Un film de Joseph Losey

    8453062747_bb66fc391e_m.jpgContinuons aujourd'hui l'exploration de l'excellente collection créée par Wild Side Video, qui, on le rappelle, ajoute judicieusement un livre bourré de photos et d'anecdotes de tournages au film en DVD. On pourra sans mal rapprocher cette publication de celle, antérieure, de He ran all the way (Menaces dans la nuit), sorti la même année que Le rôdeur

    Les deux films ont souffert de la chasse aux sorcières, c'est-à-dire la traque des affinités communistes chez les gens de cinéma par la HUAC (House of Un-American Activities Committee). Le plus célèbres de ceux qu'on appellera rapidement les Hollywood Ten, ceux qui furent convoqués pour balancer leur collègues, fut le scénariste Dalton Trumbo, officiellement blacklisté de toute production cinématographique. Pour autant, il ne cessera pas de travailler, enchaînant même le plus grand nombres de contrats possibles, acceptant des salaires ridicules n'ayant qu'un lointain rapport avec sa notoriété. Il n’apparaît alors pas au générique, laissant la place à des prête-noms.

    D'autre part, le producteur Sam Spiegel (qui montera plus tard Sur les quais, Le Pont de la rivière Kwaï ou Lawrence d'Arabie) était à l'époque en délicatesse de paiement, avec sa société Horizon Pictures, créé avec le réalisateur et scénariste John Huston. Le producteur adopta lui aussi un faux nom transparent pour la circonstance, S.P. Eagle, et signa le film de Eagle Productions.

    Le rôdeur est à l'arrivée un pur film noir, avec notamment un personnage de flic assez pervers joué avec un malin plaisir par Van Heflin. Représentant de l'autorité, il n'en est pas moins toujours sur le fil, tant il se confond avec le rôdeur du titre. La relation qu'il entretient avec Susan Gilvray, une femme mariée qui a l'air de tout faire pour le repousser, est très complexe, faite d'un mélange amour/haine qu'on peut aisément rapprocher du sado-masoschisme le plus total ; tout cela dans les limites de ce que permettait le Production Code de l'époque. Susan, le visage comme perlé de sueur, est cette femme qui "a toujours chaud". Pour sa première apparition, elle n'est vêtue que d'une serviette de bain, qu'elle conservera pendant son entretien avec deux policiers venus pister un rôdeur qu'elle avait signalée.

    La subversion transpire, telles les gouttes de sueur de Susan sur son front ; Le personnage de Van Heflin s'appelle Webb (la toile), et va, telle une araignée, tisser son réseau d'influence sur elle pour parvenir à ses fins. C'est un voyeur pervers, et Susan une femme privée de sexe qui n'attend qu'une occasion pour que sa passion déborde. 

    Le décor alterne entre espaces clos et restreints (la salle de bains de Susan, l'appartement de Webb), puis fait exploser les limites des lieux dans la dernière partie du film, dans une ville fantôme secouée par des rafales de vents qui s'insinuent dans tous les coins. Accompagnant ce mouvement, Van Eflin devient de plus en plus incontrôlable ; si, dans une séquence de la première partie, il prend sur lui et écoute attentivement son ami collectionneur de vieilles pierres, c'est à peine s'il le reconnaîtra lorsqu'il recroisera sa route dans le dernier acte.

    C'est une histoire passionnelle, une histoire de meurtre, une narration en cercles concentriques qui précipitent ses protagonistes vers une fin certaine, dans la plus grande tradition du genre : réalisée dans l'urgence et la quasi-clandestinité, Le rôdeur est un excellent film à découvrir de toute urgence.

    Vous retrouverez plus d'informations dans l'excellent livre joint à l'édition DVD, Clandestine Grandeur, écrit par Eddie Muller, un spécialiste du film noir.

  • Classics Confidential : Nightfall (1957)

    Cliquez sur l'image pour consulter la chronique du film :

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